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Bonne écoute !
Version audio
Éléments de biographie
Jakob Offenbach est né en 1819, à Cologne dans la province de Juliers-Clèves-Berg, qui à cette époque fait partie de la Prusse. À neuf ans il commence l’étude du violoncelle, d’abord en cachette de son père, qui va le découvrir et qui lui paye ensuite des leçons auprès du célèbre violoncelliste Bernhard Breuer.
Trois ans plus tard Jakob interprète ses propres compositions, dont les difficultés techniques impressionnent son maître. Avec son frère Julius (violon) et sa sœur Isabella (piano), ils jouent tous les 3 en trio dans les petites salles de bals, les auberges et des cafés. Ils y interprètent de la musique de danse populaire et des arrangements d’opéras.
Issac le papa, mesure alors pleinement les capacités de Jakob et il sait que l’avenir musical de son fils se fera en dehors de la Prusse qui laisse si peu de chances aux juifs de faire carrière. Et cela est vrai également dans les pays d’Europe, sauf à Paris !
Débuts à Paris
Et c’est ainsi qu’au mois de novembre 1833, les 2 enfants d’Issac partent pour Paris accompagnés de leur père. Le voyage dure 4 jours et il y a Jakob qui joue du violoncelle il a 14 ans et Julius qui joue du violon, il a 18 ans. L’idée du papa c’est les faire étudier à Paris.
Le violoncelle virtuose à l’opéra comique (1835)
L’Opéra comique, ou il est violoncelliste, est à cette époque l’une des deux plus grandes institution parisienne (l’autre étant l’Opéra) et en terme de modernité peut-être la plus importante de part le répertoire joué, le répertoire est celui qui circule le plus en france et à l’étranger, et Offenbach dans la fosse voit passer beaucoup d’oeuvres, de styles et de compositeurs différents.
En 1842, il fait un pari et il met en musique ceci :
MUSIQUE 01 : fables de Lafontaine Corbeau et Renard Cliquez ici
Rencontre sa femme et tournée en Angleterre, 1844
Voici une pièce composée par Offenbach et qu’il donnait en concert. Il s’agit des « larmes de jacqueline » élégie dédiée à Mme Arsène Houssaye composée en 1846. Je vous invite à suivre la très belle ligne mélodique proposée par le violoncelle et imaginez Jacques Offenbach la jouer en concert.
MUSIQUE 02 : Les larmes de jacqueline Cliquez ici
1e et 2er théâtre des Bouffes Parisiens, 1855
Le spectacle inaugural du 5 juillet est triomphal, en bonne partie grâce à la pochade intitulée les deux aveugles.
L’argument des Deux aveugles est très simple, c’est une bouffonerie musicale: Patachon et Giraffier, deux faux aveugles, se disputent le privilège d’un pont à Paris pour y faire leur quête. Il y a une alternance entre des passages parlés et des passages musicaux et/ ou chantés ; Patachon joue du trombone et Giraffier de la guitare. Le « clou » de la partition : le boléro, qui deviendra très vite célèbre et portera cette forme musicale. Voici ce duo entre Giraffier et Patachon, où les deux tentent chacun à leur tout d’amadouer un passant :
MUSIQUE 03 : Les 2 aveugles Boléro Cliquez ici
Mesdames de la Halle, Opérette, 1858
Avec son opérette Mesdames de la Halle (il s’agit ici des Halles ou l’on vend des légumes, les Halles au sens du marché), pour cette opérette donc il obtient l’autorisation d’avoir un choeur, et il est tellement content qu’il fait débuter cette opérette par un choeur qui chante dans un marché qui chante « achtez les légumes ! »
Voici les paroles : « Achtez nos legumes et nos fruits, ils n’sont pas chers, ils sont exquis,.. ; Vous n’pourriez pas dans tout Paris, en trouver à plus juste prix. Ecoutez
MUSIQUE 04 : Mesdames de la halle choeur, Cliquez ici
Orfée aux enfers 1858, 1er grand succès
MUSIQUE 05 : Galop d’Orfée aux enfers, Cliquez ici
Malgré de nombreux succès pendant le reste de la carrière d’Offenbach, Orphée aux Enfers reste le plus populaire. Les raisons de son succès sont bien sûr le cancan final mais aussi pour les valses qui rappellent Vienne mais avec une nouvelle saveur, une nouvelle couleur française.
Voici une valse extraite d’Orfée, c’est Karajan qui dirige l’orchestre phiharmonique de Berlin
MUSIQUE 06 : Orfée aux enfers, valse, Cliquez ici
La chanson de Fortunio, 1861
La Chanson de Fortunio inspiré de la pièce d’Alfred de Musset, le Chandelier. Un seul acte composé en une semaine, et une semaine supplémentaire pour les répétitions, tout va vite avec Offenbach. Voici la tendre chanson de Fortunio, toute simple et gracieuse comme Offenbach sait les écrire aussi :
MUSIQUE 07 : Chanson de Fortunio, Cliquez ici
Humour en musique, la Belle Hélène (1864)
Paroles :
Je suis le bouillant Achille, Le grand Myrmidon, Combattant un contre mille, Grâce à mon plongeon. J’aurais l’esprit bien tranquille, N’était mon talon… Je suis le bouillant Achille, Le grand Myrmidon !
Voici le bouillant Achille,
Le grand Myrmidon !
Je suis l’époux de la reine, Poux de la reine poux… Le roi Ménélas ! Je crains bien qu’un jour Hélène, Je le dis tout bas, Ne me fasse de la peine… N’anticipons pas !… Je suis l’époux de la reine, Poux de la reine poux… Le roi Ménélas !
C’est l’époux de la reine, Poux de la reine poux… Le roi Ménélas !
Le roi barbu qui s’avance, Bu, qui s’avance, bu, qui s’avance, C’est Agamemnon ! Et ce nom seul me dispense D’en dire plus long J’en ai dit assez, je pense, En disant mon nom…
Le roi barbu qui s’avance,… C’est Agamemnon ! Le roi barbu qui s’avance, Bu, qui s’avance, bu, qui s’avance, C’est Agamemnon !
MUSIQUE 08 : La Belle Hélène, Acte 1, Voici les rois de la Grêce, Cliquez ici
MUSIQUE 09 : La Belle Helène, fin acte 1, Pars pour la crête, Cliquez ici
Le Figaro et Hippolyte de Villemessant
«Il est un de ceux qui ont commencé leur carrière en même temps que moi… nous avons, je puis le dire, réussi chacun dans le genre que nous avons créé, lui dans l’opérette-bouffe, moi dans le petit journalisme; nos succès ont été frères, car ceux qui vont entendre la musique d’Offenbach lisent Le Figaro et réciproquement».
Offenbach / Mozart / La Vie Parisienne (1866)
D’un point de vie de la composition, le grand modèle de compositeur pour Offenbach, c’est Mozart, comme lui il recherche la grâce à travers la pureté de la mélodie, le raffinement de l’orchestration et la sincérité de l’émotion.
MUSIQUE 10 : Duo pauline / baron Vie parisienne, Cliquez ici
Paroles :
Paris ! Paris ! Paris ! etc., etc.
Entrons, entrons dans la fournaise. Entrons, voici le grand moment. Pour les gens qui sont à leur aise, Paris est un endroit charmant! N’avez-vous rien à déclarer? Non, rien…
Nous venons, Arrivons, De tous les pays du monde, Par la terre ou bien par l’onde.
Italiens, Brésiliens, Japonais, Hollandais, Espagnols, Romagnols, Égyptiens, Péruviens. Nous venons.
Arrivons! De tous les pays du monde, Par la terre ou bien par « onde. Nous venons. Arrivons !
La vapeur nous amène Nous allons envahir La cité souveraine. Le séjour du plaisir. On accourt, on s’empresse . Pour connaître, ô Paris, Pour connaître l’ivresse De tes jours, de tes nuits. Tous les étrangers ravis Vers toi s’élancent Paris. Nous allons chanter, Nous allons crier, Nous allons souper, Nous allons aimer, Oh! mon Dieu, nous allons tous Nous amuser comme des fous.
Voici cet extrait de la vie parisienne « la vapeur nous amène » une ode aux chemins de fer !
MUSIQUE 11 : la vapeur nous amène, la vie parisienne, Cliquez ici
La Grande duchesse de Geroldstein, 1867
Paroles :
GRANDE-DUCHESSE
Ah! Que j’aime les militaires, Leur uniforme coquet, Leur moustache et leur plumet! Ah! Que j’aime les militaires! Leur air vainqueur, leurs manières, En eux, tout me plait! Quand je vois là mes soldats Prêts à partir pour la guerre, Fixes, droits, l’oeil à quinze pas, Vrai Dieu! Je suis toute fière! Seront-ils vainqueurs ou défaits?… Je n’en sais rien… ce que je sais…
Ce que je sais…-C’est que j’aime les militaires, etc.
Je sais ce que je voudrais… Je voudrais être cantinière! Près d’eux toujours je serais et je les griserais! Avec eux, vaillante et légère, Au combat je m’élancerais! Cela me plairait-il, la guerre?…Je n’en sais rien… ce que je sais…
Ce que je sais… C’est que j’aime les militaires, etc.
MUSIQUE 12 : j’aime les militaires, Cliquez ici
Les Brigands, 1869
MUSIQUE 13 : j’entends un bruit de botte, Les Brigands, Cliquez ici
Tournée aux Etats-Unis
« Mon cher Villemessant,
Enfin, me voici à New-York, après une traversée épouvantable. Pendant trois jours et quatre nuits, nous avons été ballottés, bousculés, renversés par le roulis et le tangage. Tout ce qui n’était pas solidement attaché se brisait ; on ne pouvait se tenir debout, et à peine assis, il fallait se cramponner à un meuble quelconque. L’ouragan dans toute son horreur, les vagues balayant le navire. Le capitaine, un charmant homme et un homme de sang-froid et d’énergie, je vous en réponds, cherchait à me rassurer : « C’est superbe, me disait-il, il faut voir comme le navire s’enfonce dans les vagues pour remonter superbe au bout d’une minute ; vous devriez voir ça : c’est un beau spectacle ! – Mon cher capitaine, lui répondis-je, comme spectateur, voir ça de loin, ça doit être épouvantablement intéressant ; mais j’avoue que comme acteur, jouant un rôle dans la pièce, je trouve ça d’une gaieté plus que modérée. »
Voici une pensée adorable d’une jeune Américaine, qui était à bord avec sa sœur. Au plus forte de la tempête, et, où véritablement on était moins que rassuré, nous étions au salon donnant sur le pont du navire, nous tenant tous pour ne pas tomber et où plus d’un faisait tout bas sa prière et recommandait son âme à Dieu (je n’étais pas le dernier, je vous assure) ; la petite Américaine dit à sa sœur : « Ma petite sœur, vous devriez bien tâcher de descendre et me chercher mon joli petit chapeau : je ne voudrais mourir que dans tout mon éclat. » – « Vous faudra-t-il aussi vous monter vos gants ? » reprit l’autre.
Enfin, grâce à Dieu, nous en sommes sortis sains et saufs.
Deux milles environ avant d’arriver à New-York, on s’arrête pour la quarantaine. Comme on nous attendait la veille, on avait organisé une promenade en mer pour me chercher : le bateau, pavoisé avec des lanterne vénitiennes ; des journalistes, des ouvriers, une bande militaire de soixante à quatre-vingts musiciens, et on m’attendait à Sandy Hook ; mais comme nous n’arrivions pas, le bateau s’avançait davantage, espérant toujours me rencontrer. On était joyeux, on chantait, on riait, la musique jouait mes plus jolis airs ; mais à mesure qu’on avançait, le mal de mer se fit sentir, et les musiciens n’étaient pas les derniers à en ressentir les effets, ce qui fit que, comme dans la symphonie comique de Haydn, où les musiciens disparaissent les uns après les autres, en éteignant les lumières. Les nôtres n’avaient pas à éteindre les lumières ; mais au lieu de rendre des sons, les uns après les autres rendaient… l’âme dans la mer. L’effet, à ce qui paraît, était d’un comique achevé. De guerre lasse et notre navire ne se montrant pas à l’horizon, on était bien forcé de retourner à New-York. Et ils ont bien fait, puisque nous ne pouvions arriver en vue de New-York, où l’on stationne quelques heures, pour la quarantaine et pour la douane, jusqu’à huit heures du matin. Immédiatement, nous sommes accostés par des bateaux qui emmenaient les principaux reports des journaux de New-York. Vous comprenez que j’ai fait tout au monde pour ne pas (comme à l’ordinaire) être bête tout à fait. Et je vous assure, quand, deux heure après, nous sommes arrivés à New-York, nous étions déjà de très bons amis. En arrivant à mon hôtel, l’hôtel de… le premier d’ici, j’ai été vraiment ému de voir flotter en mon honneur, notre cher drapeau tricolore. Le soir, en revenant du théâtre (car, dès le premier jour, j’ai visité deux théâtres), je vois la foule assemblée devant mon hôtel : de la lumière électrique partout : on voyait comme en plein jour. Au-dessus du balcon de l’hôtel était écrit, en grosses lettres :
WELCOME OFFENBACH
Un orchestre, d’une soixantaine de musiciens, me donnait une sérénade ; on jouait : Orphée, la Grande Duchesse. Je n’ai pas besoin de vous dire les applaudissements, les cris de : « Vive Offenbach ! » J’ai été forcé de paraître au balcon, tout comme Gambetta, et là j’ai crié, un formidable thank you. Je ne vous dis pas avec quelles clameurs ces quelques mots anglais ont été accueillis par la foule.
Samedi, j’ai été invité à un dîner donné en mon honneur par Lotos-Club, un des premiers d’ici. Des hommes de lettres, des artistes, des négociants, des banquiers, beaucoup de journalistes de toutes nuances. Je vous envoie le menu du dîner. Des discours sans nombre ont été prononcés en mon honneur. Des toasts charmants et spirituels au possible m’ont été portés, en anglais, la plupart : on me les traduisait. J’y ai répondu par quelques mots, disant combien j’étais flatté et vivement touché de leur chaleureux accueil ; que je savais que depuis longtemps, je leur étais sympathique comme compositeur, et que j’espérais que lorsque j’aurais l’honneur de leur être plus connu, je leur serais aussi sympathique comme homme. Je porte un toast aux Etats-Unis, mais non pas aux Etats-Unis tout sec, les arts comme les peuples étant frères, Je porte un toast aux Etats… Unis à l’Europe. Voilà a peu près ce que j’ai dit et ce qui a été applaudi à outrance.
Je suis sûr que tout ce que je vous écris là vous intéresse, puisqu’il s’agit de moi et que je connais votre longue amitié à mon égard. Adieu mon cher ami. Embrassez vos chers vôtres et à vous, ma meilleure poignée de main.
JACQUES OFFENBACH
Les Contes d’hofmann, 1877
MUSIQUE 14 : Belle nuit d’amour, Cliquez ici
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